Parce que j'ai essayé sans jamais y arriver, j'ai décidé de leur confier la lourde tâche de m'aider à la quitter. Farid Marouani et Fleur Stimamiglio, hypnotérapeutes, m'ont déjà reçue deux fois dans leur cabinet pour me permettre d'en finir une bonne fois pour toutes avec la cigarette. Une dernière étape m'attend au terme de laquelle ce sont dix ans de dépendance qui devraient partir en fumée. Théoriquementæ
Le jour J, c'est avec déchirement que je regarde chacune de mes dernières cigarettes et à H-2, la hantise de perdre la face m'obsède. Comment peuvent-ils être aussi certains que je n'aurai plus cette envie qui date de plus de dix ans ? Bien qu'invraisemblable pour tous ceux qui ne l'ont jamais connue intimement, j'aime la cigarette !
La der des ders
Je l'aime par -15 °C, je l'aime avec un bon café, je l'aime après une séance de ciné, je l'aime au volant, je l'aime matins, midis et soirs ! Ce que je n'aime pas, c'est son odeur qui s'imprègne sur mes vêtements, devoir supporter les -15 °C le temps de la fumer, voir ses cendres recouvrir la banquette arrière de ma voiture et surtout, ne pas réussir à m'en débarrasser !
Juste avant de me diriger vers le cabinet des deux praticiens, je me réserve cinq bonnes minutes pour savourer ce qui devrait être la der des ders. Après avoir fumé la moitié du filtre, je l'écrase et entre dans le cabinet des deux praticiens. Cette fois, c'est Fleur qui mène la séance. Je m'habitue très rapidement à sa voix douce et rassurante. Comme lors de la séance précédente (notre édition du vendredi 28 mars), je me laisse aller dans un rêve guidé par l'unique son de sa voix.
Une fois terminé, je me sens apaisée. Je sens dans le regard de Fleur et Farid une pointe d'impatience : « Alors, comment vous sentez-vous ? » Un peu tourneboulée par cette longue sieste, j'ai d'abord un peu de mal à mettre des mots sur mon état. « Je vais bien… Enfin, il me semble ».
Pour les deux praticiens, je suis officiellement non fumeuse. « Si vous avez la moindre difficulté, il ne faut pas hésiter à nous appeler. Nous seront là à n'importe quelle heure ». Une info plutôt intéressante sachant qu'à peine sortie, j'ai déjà envie de rallumer une cigarette.
La première soirée est difficile, très difficile mais n'ayant plus de cigarettes, la question ne se pose même pas. Le manque me réveille la nuit et le jour qui suit s'acharne encore un peu plus. Chaque seconde qui passe est un véritable supplice. Lorsque j'arrive enfin à oublier un peu, je me souviens que j'ai oublié, puis j'y repense. Comme dans un film, la paranoïa s'installe. Les gens se transforment en cigarette géante et chaque sujet de conversation me ramène à la même conclusion : « Il faut que je fume ». Mais pour une raison que je ne m'explique pas, impossible de demander une cigarette, les mots ne veulent pas sortir de ma bouche. Persuadée que l'hypnose n'avait eu aucun effet sur moi, son utilité se dévoile enfin, semble-t-il.
La liberté
au bout des doigts
Le deuxième jour est à quelque chose près identique au précèdent et au suivant. Chaque moment de latence est une souffrance. Impossible de rester assise à ne rien faire, il faut occuper mon esprit pour éviter de me torturer davantage.
Finalement, le quatrième jour sera fatidique. Seule chez moi, je craque, et allume une demi-cigarette trouvée sur la table du balcon. Le verdict tombe à la deuxième bouffée, lorsque mon cerveau fait trois tours sur lui-même. Un vertige plus puissant que celui de ma toute première cigarette me fait éteindre ce bâtonnet toxique sans aucune hésitation.
Aujourd'hui, cela fait une semaine que j'ai arrêté. Ma respiration est plus fluide, mon teint est paraît-il « plus lumineux » et surtout, je me sens libérée. Bien que l'envie de fumer survienne encore à chaque fin de repas, au moment de l'apéritif et à chaque café, la liberté de ne plus être dépendante vaut sans aucun doute tous ces sacrifices. Défi relevé !
Julia Derossis
riom@centrefrance.com